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© DR

Un nouvel accrochage pour le salon de musique de Malmaison

La réouverture après travaux du salon de musique de Malmaison a permis de renouveler la présentation d’une partie des collections de tableaux du musée

L’apparence du salon de musique à l’époque de l’impératrice est connue par des     sources écrites, comme son inventaire après décès, mais aussi par une aquarelle d’Auguste Garnerey datée de 1812 et conservée dans les collections du musée. On sait que Joséphine y exposait ses tableaux modernes, c’est-à-dire peints par des artistes de son temps, tandis que ses œuvres anciennes se trouvaient dans la grande galerie, désormais détruite mais que l’on peut apercevoir par les fenêtres à l’arrière-plan de l’aquarelle. Les tableaux que vous pouvez admirer aujourd’hui sur les murs du salon de musique datent tous du début du XIXe siècle.

 

Les collections de l’impératrice Joséphine ont été dispersées quelques années après sa mort. Son fils Eugène a vendu de nombreuses œuvres prestigieuses au tsar Alexandre Ier : la plupart d’entre elles se trouvent aujourd’hui à Moscou et Saint-Pétersbourg. Sa fille Hortense en a emporté plusieurs à Arenenberg, sa maison suisse. Certains tableaux, partis dans d’autres mains, ont pu être rachetés au fil du temps par le musée de Malmaison. Quelques-uns ont été remplacés par des répliques, c’est-à-dire des versions peintes par l’artiste lui-même, mais qui ne sont pas celles ayant appartenu à Joséphine. Le réaccrochage doit tenir compte de tous ces paramètres.

 

L’aquarelle d’Auguste Garnerey témoigne de l’accrochage tel qu’il existait en 1812, mais on sait que celui-ci variait régulièrement et que l’impératrice manquait de place pour montrer l’ampleur de ses collections. Le mur à droite de l’entrée a pu être reconstitué presqu’à l’identique. On peut y voir, en partie supérieure, Les Honneurs rendus à Raphaël après sa mort de Pierre Nolasque Bergeret : le tableau de Joséphine se trouve aujourd’hui aux États-Unis, mais le château de Versailles en a déposé une réplique à Malmaison. En 1812 étaient exposés juste en dessous trois tableaux de Fleury Richard, dont deux, Valentine de Milan pleurant son époux et Les Adieux de Charles VII à Agnès Sorel, sont aujourd’hui en Russie : eux aussi sont évoqués par leurs répliques. Enfin, au centre, La Reine Blanche éloignant saint Louis de son épouse malade (Arenenberg, musée Napoléon) est remplacé une autre œuvre de l’artiste ayant appartenu à Joséphine, Jacques de Molay, grand maître des Templiers, allant à la mort.

 

Sur le mur d’en face était accroché en 1812 un grand format : nous y avons donc placé une toile de dimensions semblables, Jeanne de Navarre emmenant son fils sur le tombeau de son père. Peinte par une femme, Henriette Lorimier, cette œuvre fut achetée par l’impératrice après le Salon de 1806. Récemment prêtée au Louvre pour l’exposition « Un musée révolutionnaire », elle n’a pas été montrée dans les salles de Malmaison depuis plus d’un an. Son accrochage inhabituellement haut est volontaire et a été mis en place pour respecter l’esprit du temps de Joséphine. Il en va de même, sur le mur de droite, pour La Mort de Marie Stuart de Jean-Baptiste Vermay, réplique du tableau de l’impératrice aujourd’hui à Arenenberg.

 

Présentée à hauteur d’œil, la Vue de Florence de Turpin de Crissé rappelle le penchant de Joséphine pour le genre du paysage. L’impératrice appréciait également la peinture de fleurs, ce dont témoigne, sur le même mur, la petite esquisse de Jan Van Dael. Celle-ci rappelle le souvenir d’un grand tableau de ses collections aujourd’hui au musée Pouchkine, à Moscou. Exposée juste en face, l’immense Guirlande de Julie en est le pendant.

 

Cet accrochage peut paraître dense à un visiteur habitué aux musées modernes, où l’on évite généralement de placer des tableaux en deuxième ou troisième rang, c’est-à-dire sur deux ou trois hauteurs différentes. Cependant, ces habitudes de dépouillement sont récentes dans l’histoire des collections et des musées. Malmaison manque de petits formats ayant appartenu à Joséphine. Ceux que nous possédons ont été placés sur deux rangs dans les angles, afin d’imiter les superpositions visibles sur l’aquarelle d’Auguste Garnerey.

 

Le nouvel accrochage du salon de musique de Malmaison met en valeur le goût de Joséphine pour ce que l’on appelle aujourd’hui la « peinture troubadour ». Les artistes de ce courant pictural, né dans les années 1800, puisent leurs sujets dans l’histoire et la littérature du Moyen Âge, de la Renaissance ou du XVIIe siècle, rarement illustrés par leurs précédesseurs. Les nobles sentiments – du chagrin de Valentine de Milan après l’assassinat de son époux à la calme grandeur de Jacques de Molay conduit au bûcher en passant par l’amour de Charles VII pour Agnès Sorel – sont particulièrement appréciés. L’impératrice fut l’une des premières à acheter des œuvres troubadour, tant auprès d’artistes confirmés, à l’image de Fleury Richard, que de débutants, comme Henriette Lorimier. La présence de grands formats, le choix de sujets originaux et la diversité des peintres font de la collection exposée dans le salon de musique Malmaison l’une des plus représentatives de la richesse de ce courant.